La Place Saint-Michel à Bordeaux Bordeaux - Photo Asgeir Pedersen, Spots France
Saint-Michel sous la pluie

La Place dite Saint-Michel, composée des places Canteloup et Meynard, s’articule autour de la basilique du même nom. Bastion populaire du centre-ville, ce quartier le plus vivant et cosmopolite de la cité trouve ses racines dans le Bordeaux médiéval marchand et artisan, où les gabares déversaient leur cargaison de bois au bas de Saint-Michel, alimentant les ateliers des charpentiers (de la Rue Carpenteyre), des tonneliers-fustiers (de la rue de la Fusterie). A côté des forgerons et armuriers de la rue des Faures, les marchands de sel du quai des Salinières fournissaient les sécheries de viandes et poissons de la rue de la Rousselle.

Depuis toujours Saint-Michel rassemble et mêle des populations d’origines sociales et culturelles diverses. Il constitue le quartier d’accueil des mouvements d’immigration successifs de Bordeaux : après les Espagnols et les Portugais durant la première moitié du XXe siècle, puis les familles du Maghreb dans les années 70, ce sont désormais les populations d’Afrique subsaharienne et d’Europe de l’Est qui viennent s’installer, tout près du Marché des Capucins et de la place florissant d’épiceries, de cafés et de brocantes.

La Place Saint-Michel à Bordeaux Bordeaux - Photo Asgeir Pedersen, Spots France
La Place Saint-Michel

La Basilique Saint-Michel et sa Flèche

La Basilique trône au sein de la place autour de laquelle gravite les emplacements du marché, les terrasses de cafés et les espaces de jeux. L’actuel édifice succède à une première chapelle carolingienne, dédiée à l’archange Saint-Michel, construite en dehors des remparts de la ville, en surplomb de la Garonne.

Au IXe siècle, l’église est transformée en paroisse des marins, des mariniers et des artisans et commerçants attachés au port de la Lune. Le quartier se développe au XIVe siècle, générant la construction d’une nouvelle église, achevée au XVIe siècle, sous la direction de l’architecte Jean Lebas. Celle-ci se distingue par son style gothique flamboyant, et par son clocher indépendant, une particularité que l’on retrouve à la cathédrale Saint-André, Place Pey-Berland.

Cette « Flèche » édifiée à quelques mètres de la nef, porte le clocher à 114 mètres soit le point culminant de la ville et le clocher le plus haut du Midi français. Cantonnée de contreforts et de pinacles, elle supporte un campanile doté d’un carillon de sept cloches en volée et quinze cloches fixes.

La basilique s’appuie sur une voûte monumentale de 32 piliers, haute de 23 mètres. Elle est classée au titre des Monuments Historiques en 1846, et inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1998 au titre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France.

La Basilique Saint-Michel à Bordeaux - Photo Asgeir Pedersen, Spots France
La Flèche de la Basilique Saint-Michel

Résistance aux tempêtes et aux bombes

L’édifice a essuyé nombre de catastrophes naturelles et conflits historiques. Après le tremblement de terre qui secoue Bordeaux le 10 août 1759, il est frappé à plusieurs reprises par la foudre, et la flèche est emportée par un ouragan en septembre 1768. Le clocher, alors tronqué à hauteur des 99 metres, a suscité bien des émois, et notamment ceux de Victor Hugo lors de sa visite à Bordeaux en 1843 :

« La tour, quoique couronnée encore d’un bloc à huit pans et à huit pignons, est fruste et tronquée à son sommet. On sent qu’elle est décapitée et morte. Le vent et le jour passent à travers ses longues ogives sans fenestrages et sans meneaux comme à travers de grands ossements. Ce n’est plus un clocher ; c’est le squelette d’un clocher »

(Extrait des Momies de Saint-Michel, Alpes et Pyrénées, Victor Hugo).

Ce n’est qu’en 1869 que les travaux de réfection de la flèche dans le style gothique sont achevés, sous la direction de Paul Abadie, architecte du Sacré Cœur de Paris et de la cathédrale Saint-Front de Périgueux.

Les bombardements du 21 juin 1940, dont on peut déceler les impacts sur la façade de la basilique, n’ont pas épargné les vitraux de l’édifice. Ils seront remplacés par des verrières modernistes réalisés par les artistes Max Ingrand et Jean-Henri Couturat.

La Crypte et les momies de Saint-Michel

En 1791, le directoire du département ordonne la suppression de l’ancien ossuaire paroissial entourant l’église Saint-Michel : plusieurs dizaines de corps momifiés sont alors découverts et déplacés dans la crypte située sous le clocher. Les » momies de Saint-Michel » sont longtemps restées visibles par le public, et ont marqué les esprits de nombreux auteurs tels que Stendhal, Théophile Gautier, ou encore Victor Hugo s’exprimant en ces mots : « Ces visages effrayants, cette foule de têtes sinistres ou terribles ». En 1979, elles sont de nouveau transférées et inhumées au cimetière de la Chartreuse. Désormais, une vidéo est mise en place sur le parcours de visite pour relater l’histoire des momies, parmi lesquelles on compte « L’Enterré vivant », de « la famille empoisonnée par les champignons», ou encore de « L’africaine ».

La Place Saint-Michel enchante par la diversité de ses couleurs, notamment les jours de marché, recouverte d’étals débordant de fruits et légumes et par la diversité des visages et des sourires. Elle ravira surtout les courageux qui graviront les 230 marches de la Flèche pour attendre le point culminant de la ville, gage d’un panorama exceptionnel à 360 degrés.

Photos par Asgeir Pedersen, Spots France